Ce n’était encore qu’un manoir à l’époque de la Réforme. Lauvergnac doit son bel aspect d’aujourd’hui à ses propriétaires ultérieurs. En ce début du XXIe siècle, le château, restauré et agrandi, est devenu une adresse prisée pour organiser des repas de mariage et autres événements.
Lauvergnac n’était donc pas une place forte qui puisse apporter quelque sécurité aux premiers huguenots de l’Église de Piriac. Les protecteurs naturels de cette communauté peu connue étaient les Tournemine, barons de Campzillon. Le pasteur de Rennes, en venant célébrer en 1559 à Piriac les noces de Pierre de Tournemine et de Marie Kermarrec, avait fondé une communauté assez forte pour disposer d’un ministre du culte, mais trop faible pour résister aux persécutions qui ne tardèrent pas. Les huguenots du lieu se réunissaient dans la chapelle Saint-Fiacre dont le porche subsiste aujourd’hui. Les Le Pennec figuraient parmi les vassaux du baron de Campzillon. Ne nous étonnons pas des consonances bretonnes des noms de famille, la presqu’île de Guérande représentait alors l’extension la plus méridionale de la langue celtique. La famille Le Pennec, anoblie en 1433 à la suite d’un fait d’armes de l’aïeul, possédait également le manoir de Kerdour, à Batz-sur-mer, le château des Lesnérac en Escoublac, et surtout la seigneurie du Bois-Jalland en Saint-Nazaire. Le manoir de Lauvergnac, en La Turballe, n’était donc qu’une de ses terres. Marc Le Pennec semble avoir très tôt embrassé la Réforme, peut-être même avant la célèbre prédication organisée par d’Andelot au château de la Bretesche. Il épousa en mai 1559 Jeanne Avril, la fille de Jean Avril, premier président de la Chambre des comptes de Bretagne, celui-là même qui accueillit dans son manoir de Lourmois la première cène célébrée en Bretagne. Marc Le Pennec se trouva par la force de choses un des principaux appuis de la Réforme dans le pays de Guérande après que Pierre de Tournemine eut préféré se réfugier dans les îles de la Manche quand vinrent les persécutions. Il décéda en 1571. Sa veuve et son fils Gédéon prirent la suite.
Voila pourquoi le manoir de Lauvergnac, simple « huguenotière », servit de lieu de rassemblement pour les protestants de la région en 1575. Les assemblées qui s’y tenaient étaient secrètes, et c’est le pasteur de Nantes qui les visita cette année-là.
Nous retrouvons Gédéon Le Pennec gouverneur et défenseur du château de la Bretesche contre Mercoeur et les Espagnols pendant les guerres de la Ligue. La place tomba en août 1591 et notre Gédéon fut fait prisonnier. Il ne put se libérer que contre une forte rançon qui ruina temporairement la famille. Les Le Pennec semblent avoir abandonné le Calvinisme à la fin de cette période, tandis que les huguenots de Piriac se rattachaient aux communautés protestantes du Croisic ou de la Roche-Bernard.
Le château de Lauvergnac, présenté en 1567 comme « maison et manoir noble de Lauvrignac avec deux jardins, l’un grand et l’autre petit, cernés et fermés de murailles joignant les maisons et logis avec une basse cour close de fossés au devant de la grande porte. » était trop faible pour constituer un enjeu militaire et se trouva donc épargné lors des guerres qui suivirent. Il subsiste comme témoin d’un temps où une forte part de la noblesse du pays de Guérande était passée à la Réforme.