Achille Le Fourdrey, restaurateur du protestantisme en Bretagne Occidentale.
Achille le Fourdrey est né à Cherbourg le 2 avril 1803. Son père, Guillaume, y était juge de paix. Achille est élevé dans un catholicisme sans doute assez tiède, la famille étant « patriote » pendant la Révolution. Le jeune Achille rencontre à 14 ans Amice Ollivier, un pasteur méthodiste venu de l’île anglo-normande d’Aurigny, toute proche, établir une petite communauté protestante à Cherbourg. Selon la notice nécrologique que lui consacre en 1854 le pasteur James Williams, de Quimper, dans le Bulletin Évangélique de Basse-Bretagne (mars 1855, p. 121-125), Achille Le Fourdrey « commença alors à étudier l’Écriture Sainte, pour savoir si ce qu’on leur disait était conforme (Actes 17 :12)… Après avoir beaucoup prié, il quitta l’Église romaine et devint membre consciencieux de l’Église réformée, et, avant l’âge de 16 ans, il commença à évangéliser dans les environs de Cherbourg… Son père l’avait destiné au barreau, et, bientôt après, il quitta Cherbourg pour Caen, où, après avoir étudié le droit, il fut reçu avocat. Tout en exerçant ses fonctions d’avocat, il ne perdait pas de vue le Saint-Ministère… Ses prières furent exaucées et il quitta la Normandie pour Londres, où il étudia la théologie sous ce savant et pieux serviteur de Dieu, John Pye-Smith [(1774-1851), c’est-à-dire à Homerton Divinity College]. Il fut consacré au Saint-Ministère à Londres ».
« L’année 1832 », reprend J Williams dans sa nécrologie, « il fut envoyé à Brest par la Société Évangélique de France, qui était à la veille de son organisation. Il fut employé et entretenu par cette société jusqu’à que ce l’Église de Brest fut reconnue par l’État [1834]… Lorsqu’il est arrivé à Brest, le protestantisme était presque inconnu dans le Finistère… Pendant plusieurs années, il travailla nuit et jour pour former une espèce de communication entre les protestants disséminés dans la Basse Bretagne. Il y trouva plusieurs familles qui, ayant quitté leur pays natal dans leur jeunesse, avaient presque oublié les premiers principes de la religion évangélique. Il voyagea partout pour visiter ces familles… Souvent, il visita Lorient, qui est à 38 lieues de Brest, et, quand ses moyens pécuniaires ne lui permettaient pas de payer la voiture, il faisait ce long trajet à pied. Plusieurs fois, il quitta Brest pour accompagner des colporteurs bibliques… »
« Notre ami », poursuit James Williams, « était essentiellement évangélique dans ses principes. Il est vrai qu’il n’était pas ce qu’on appelle un homme de parti ; mais la vérité exige qu’on dise de lui que toutes ses sympathies étaient acquises à ceux qui croient aux doctrines bibliques de l’Église réformée : le Salut gratuit par le sang du Sauveur, la divinité de Jésus-Christ, l’intégrité et la pleine inspiration de l’Écriture sainte étaient pour lui des dogmes si sacrés qu’il croyait qu’il n’est pas permis aux hommes d’y porter la moindre atteinte ».
Le rôle d’Achille Le Fourdrey a été fondamental dans l’établissement du protestantisme en Bretagne Occidentale. Il y a suscité la création des communautés réformées contemporaines. Sa formation de juriste lui a permis de défendre ses collègues et ses collaborateurs dans les nombreux procès d’une époque qui bafouait souvent la liberté d’expression. Il réussit à obtenir de l’État en 1852 la création d’un consistoire de Bretagne dont le chef-lieu était à Brest. Il y intégra, outre Rennes, comme oratoires « réformés » les implantations méthodistes de Quimper et Lorient, l’Église baptiste de Morlaix ( !) et le culte presbytérien de Landerneau. On ne pouvait imaginer plus large ! James Williams peut affirmer, à juste titre, que « personne plus que lui n’admirait l’Alliance évangélique »…
Achille Le Fourdrey décède prématurément à Brest le 15 décembre 1854, à l’âge de 51 ans, après une courte maladie. La mémoire orale de la famille Jenkins, de Morlaix, rapporte qu’il aurait contracté le choléra lors de la grande épidémie de cette ville quand il y était venu assurer le service d’inhumation de deux enfants du pasteur John Jenkins, mais son décès est un peu plus tardif. Peut-être avait-t-il réchappé dans un premier temps avant de s’affaiblir ensuite.
Le pasteur s’était marié en 1826, sans doute à Guernesey, avec Suzanne Elisabeth Dumaresq, née dans cette île en 1804, décédée à Paris en décembre 1881. Le couple eut deux enfants : Adrienne Augusta Blanche, et Ernestine qui épousa en 1846 un officier de Marine protestant, Joseph Alain Jules Caradec (1819-1853). Une de ses petites filles, Adrienne Blanche Caradec, (1847-1902) se maria en 1871 avec le pasteur méthodiste de Quimper, Pierre Rouffet.
Jean-Yves Carluer